Petit rappel pour les deux du fonds qui ne suivent pas : les séries Marvel estampillées MAX sont des variations sur certains personnages emblématiques de la Maison des idées, variations totalement déconnectées de la continuité. En plus de cela, leurs auteurs se voient accorder une liberté de ton quasi-absolue et n’ont donc pas à s’embarrasser de la censure. La gamme MAX a déjà connue quelques fleurons, comme The Punisher de Garth Ennis (puis son relaunch (oui, un relaunch d’un titre hors-continuité) par Jason Aaron)), Alias de Brian M. Bendis et Michael Gaydos ou encore Supreme Power de J.M. Straczynski et Gary Frank. Et, on peut d’ores et déjà le prédire, ce Deadpool MAX par… David Lapham et Kyle Baker ! Oui, s’il y a bien quelque chose qui surprend dès la couverture du premier album sous le nez, ce sont les auteurs. Deux grands noms du comic-book aux styles complétement opposés. Si le premier s’est fait un nom dans le polar hard-boiled comme auteur complet (la série Stray Bullets ou encore Silverfish) avant d’élargir ses horizons seulement en tant que scénariste (le tout récent Crossed : Valeurs Familiales), le second a débuté dans le dessin humoristique (Undercover Genie) et s’est fait connaître grâce à sa chronique de la vie new-yorkaise Why I hate Saturn et surtout à sa reprise audacieuse et – osons le dire – génialissime de Plastic Man chez DC. Et autant dire que ces deux petits génies donnent le meilleur d’eux-mêmes dans ce Deadpool MAX. David Lapham nous secoue dès le début en posant les bases de son récit : le personnage de Wade Wilson n’est qu’un cinglé qu’une institution secrète américaine utilise à sa guise par le biais d’un de leurs agents. Celui-ci, contraint et forcé, manipule Deadpool en lui faisant croire que les cibles à attaquer sont liées à l’organisation secrète Hydra, un groupuscule qui obnubile notre mercenaire. Et les différentes missions auxquelles sera confronté ce anti-héros seront autant d’occasion pour le scénariste de revisiter l’univers Marvel à sa guise ! On peut y croiser, au choix, un Cable mythomane semblant vivre dans le déni, un baron Zémo fasciste et pathétique ou encore une Domino nymphomane et ayant de légers problèmes psychologiques. Le tout dans une ambiance de folie furieuse complètement décalée, où la violence totalement décomplexée n’a d’égale que l’humour, parfois raffiné, parfois gras, et souvent pince-sans-rire. En effet, malgré toutes les péripéties loufoques de l’album, il se dégage une forte touche d’amertume lié à Deadpool (on ne sait jamais vraiment s’il est lucide ou non) et aux quelques autres personnages gravitant autour. Des personnages creusés, au fort potentiel comique mais avec également une vraie douleur au fond. Et Lapham arrive à concilier avec talent le comique de situation et la profonde détresse des personnages. Un récit aussi fou et original demandait nécessairement un dessinateur d’envergure. Et, pour peu que l’on sache l’apprécier, le style de Kyle Baker est un régal pour les yeux ! Bien sûr, l’auteur ne plaira pas à tout le monde, et son dessin unique, composé de visages expressifs, réalistes et cartoony à la fois, d’un trait faussement maladroit et « pris sur le vif », de patchworks à base de photographies et d’un storytelling classique et très inspiré a beaucoup de réfractaires. La gestion des couleurs, très originale également (pas mal de tons pastel et beaucoup de dégradés de couleurs semblant fait à la bombe aérosol), dénote avec l’idée que l’on se fait de la colorisation. Quoi qu’il en soit, cet artiste au style vraiment atypique (regardez sur internet pour vous faire une idée) convient parfaitement au ton décalé et unique de la série, et est un petit régal pour les yeux. Il arrive que deux artistes réunis accouchent d’une œuvre dont la qualité va bien au-delà de la somme de leurs talents respectifs. Ce Deadpool MAX en fait partie. Une œuvre forte, originale et singulière, dont la suite se fait impatiemment attendre. |
t.1 - Un penchant pour la violence
Deadpool en MAX : ils ont osés !
Ajouter un commentaire